ANGE + aux sombres héros de l'amer

Son père était rentré depuis quelques années déjà. Il avait changé. La guerre l'avait transformé. Il ne parlait que très peu, revivait dans ses rêves les événements traumatisants de ses missions. Il arrivait même à l'effrayer, elle sa petite fille adoré. Il se jetait à terre lorsqu'un avion passait au-dessus de leur appartement, paniquait au simple sifflement d'une cocotte-minute, hurlait une à deux fois par nuit... Pour pallier ses peurs, Paul s'était réfugié dans l'alcool. Chose classique me direz-vous. Il ne buvait pas comme un trou, non, il arrivait plus ou moins à gérer sa consommation. Bourré il était plus loquace. Il parlait de ses missions. Toujours de ses missions. De ses camarades morts, piégés, blessés. Des jeux qu'il faisait avec eux, de tous ces trucs qu'Ange connaissait aujourd'hui par coeur. Ces histoires, c'est comme si elle les avait vécues, tellement elle en connait les détails. L'alcool le faisait aussi parfois délirer. Raconter des trucs complètement absurdes. Du style Oh princesse, t'sais quoi ? J'ai couché avec ta mère. Oui jusque là c'était logique. Eh princesse tu sais quoi ? Ta mère, beh, en fait, c'était ma femme, mais, c'était aussi ma soeur. Absurde non ? Probablement. Du moins c'est ce que disait Ange. C'étaient là les délires d'un gars complètement torché, traumatisé par ses souvenirs. Rien de plus. N'est-ce pas ? Hein c'était complètement absurde... Et dégoûtant.

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Aider son père était bien l'une de ses priorités, mais cela lui était aujourd'hui impossible. Il avait sombré. Plongé dans sa folie. Il vivait sur le front, au milieu des combats. Terrorisé par un rien, il était devenu paranoïaque, voyant en chaque homme un potentiel ennemi. Une potentielle victime. Ange avait dû déménager. Partir n'était pas chose facile, elle avait dix-huit ans et le fait de laisser son père en hôpital ne la rassurait pas vraiment. Mais elle se fit une raison. C'était là, la meilleure décision, pour lui, comme pour elle. Il vivrait encadrer, serait surveiller. Quant à elle, terrorisée par l'idée de se retrouver seule, elle avait choisi la collocation.