Ain't it fun when you're taking care of number one ?
- Pourquoi diable ne te comportes-tu pas un peu plus comme ton frère ? Entendais-je répéter chaque jour de ma vie, sans que ce sempiternel discours ne change d'un iota. Du personnel de maison à mes propres parents -lorsque ceux-ci daignaient rentrer à la maison afin de passer du temps avec leurs enfants soit-dit-, tels étaient les mots qui m'étaient constamment adressés, chaque fois que l'enfant que j'incarnais avait le malheur de faire un faux pas. Pourquoi ne prends-tu pas exemple sur Wesley ? M'interrogeaient-il en chantant les louanges du petit garçon parfait que représentait mon ainé, constamment le nez dans les bouquins, à faire tout son possible pour réussir un avenir brillant, faisant honneur au nom que nous portions tout deux. Pourquoi n'étais-je donc pas comme lui ? Cette question, moi aussi je me l'étais posée à de nombreuses reprises, sans pour autant y trouver de réponse. Dépitée, j'avais mis cela sur le compte de gênes défaillants, ou d'un procédé différent, pour, au final, arriver au même but : attirer l'attention de nos géniteurs, les forcer à se rendre compte de notre existence. Cela n'était plus un secret pour nous depuis longtemps -nous savions pertinemment que le seul moyen d'obtenir cette chance était de gagner leur respect et leur admiration : mais comment donc aurais-je pu accéder à ce rang privilégié du haut de mes quatre ou douze ans ? Certainement pas en leur offrant des coloriages réalisés avec amour -si tant est qu'ils soient familier avec ce concept, qui semblait ne pas s'appliquer à l'éducation qui nous avait été transmise durant nos jeunes années. Si nous n'avions jamais manqué de quoi que ce soit, et, en quelque sorte n'avions par conséquent pas eu à nous plaindre de notre mode de vie typique des banlieues riches de Londres, nous sentions au fond de nous que tout cela n'était pas naturel, qu'il manquait quelque chose à notre famille qu'aucun objet matériel n'aurait pu remplacer : l'affection de nos parents. Si à leurs yeux, nous étions tous deux précieux pour la descendance de la famille Divinovish, nous n'incarnions bien que cela dans leur cœur : des héritiers potentiels. Loin des parents débordants d'amour que l'on pouvait retrouver dans les séries américaines en zappant un peu sur notre téléviseur, leur vision du statut de géniteur différait beaucoup de la traditionnelle relation que l'on s'imaginait au premier abord. Un sourire de leur part requérait une action réussie, si encore, celle-ci relevait d'un exploit inespéré. Nous étions des Divinovish, il était bien plus que naturel que tout ce que nous touchions se transforme en or. Edward, mon père, avait créé sa propre entreprise sans jamais avait eu recourt aux ressources de la famille, se forgeant lui même sa propre popularité parmi les grands du business les plus prestigieux qui puissent être; Alexandra, ma mère, s'était quant à elle fait un nom dans le monde du journalisme, dirigeant sa propre revue de mode, que chaque femme qui se respectait en se monde devait au moins connaitre de près ou de loin. Autant dire que la pression avait toujours été haute pour les bambins que nous étions, qui ne rêvaient à l'époque que de s'amuser et de découvrir l'univers qui nous entourait. Cela consistait en l'une de nos rares passions communes, à Wesley et à moi, d'explorer le monde. Nous balader en journée, ou le soir venu, armés d'une lampe torche, errant à travers les ruelles de la ville à la découverte de passages secrets ou autres mystères dont pouvait regorger notre lieu de vie nous amusait bien plus que tous les jouets qui avaient pu nous être offerts. Lui aussi, malgré sa raison qui dominait majoritairement ses émotions appréciait l'adrénaline que ces promenades nous procuraient : nous savions qu'il aurait suffi de nous faire prendre pour que la nourrice nous force à rester cloitrés à la maison des jours durant sans rien faire d'autre que les devoirs que nous ramenions de l'école, mais nous prenions le risque sans hésiter, si cela pouvait nous permettre de nous distraire de nos responsabilités quotidiennes, au moins pour un temps. Si j'étais alors encore trop jeune pour effectuer quoi que ce soit d'autre que des gribouillages informes, notre père avait rapidement estimé Wesley prêt à apprendre les rudiments de l'économie et des lois du marché, lui confiant une tonne de travaux supplémentaires s'ajoutant à ceux, déjà nombreux, qui lui étaient imposés dans le cadre de ses études, réduisant de beaucoup les quelques heures qu'il m'accordait chaque jour en rentrant du collège. Le seul point positif à concrètement, ne pas avoir de vrais parents, c'était qu'entre frangins, on apprenait à se serrer les coudes. Que ce soit en terme de scolarité, de culture, ou tout simplement de conseils de vie, Wesley avait toujours été là pour moi, endossant à lui seul le rôle de frère, ami, confident, mais également de père, de celui que nous n'avions jamais eu. C'était lui, qui insistait pour venir me chercher à pieds à l'école alors que la nourrice arguait qu'elle pouvait très bien appeler un chauffeur qui lui aurait épargné la demi-heure de trajet, c'était lui qui avait pris les fourneaux lorsque notre mère avait congédié le cuisinier un jour trop tôt, nous laissant les estomacs grondants une journée durant; c'était également lui, qui avait été présent pour moi lorsque j'étais tombée de vélo pour la première fois, ou lors de ma première relation amoureuse, pour me conseiller sur la démarche à suivre, sans manquer de menacer mon prétendant d'une mort douloureuse s'il osait me faire du mal. C'était lui qui avait toujours été là, et en cela, je savais que je ne pourrais jamais le remercier assez, si tant est que ma fierté me permette d'exprimer ne serais-ce que la moitié de ma gratitude à son égard. A la place, j'avais toujours poussé à bout ses limites, m'agaçant de ne jamais l'entendre se plaindre face aux traitements désagréables auxquels je le soumettais chaque fois que l'occasion se présentait. Des réunions avec les professeurs dont je faisais de la vie un enfer aux caprices d'enfant auxquels je le savais ne pouvoir céder, je lui en avais toujours fais voir de toutes les couleurs, me rassurant du fait que contrairement au reste de mon entourage, Wesley, lui, ne me quitterait jamais, quoi que je puisse faire, dire, ou penser -il resterait mon grand frère dévoué.
- Gabrielle ! Tu veux bien m'écouter, oui ? Répéta la femme de ménage, en jetant un regard empli de rage sur le sol que je venais de tâcher de mes chaussures boueuses, qui avaient laissé sur le sol des trainées noirâtres qui nécessiteraient un lavage supplémentaire.
Relevant les yeux vers elle, ma seule réaction fut de retirer une manche de mon manteau dégoulinant d'eau stagnante, puis, la deuxième, avant de faire tomber celui-ci à terre, tandis que mon ainé se dirigeait vers moi, ses grands yeux bleus portés sur ma figure mouillée tandis que pouvait se lire dans son regard toute l'inquiétude qu'il nourrissait à l'idée de me savoir frigorifiée. Après m'avoir prise dans ses bras en me signalant qu'il s'en allait chercher des couvertures pour me maintenir au chaud, je ne pus qu'adresser un regard empli de malice à la pauvre employée qui soupirait d'exaspération en constatant la gravité des dégâts que j'avais pu causer sur son travail supposément achevé pour la journée.
- C'est votre boulot, conclus-je en entrant dans le grand salon, sans prendre la peine de retirer mes souliers maculés de terre. Après tout, mes parents vous payent pour ça, non ?
Commentaire auquel elle ne trouva rien de décent à rétorquer, tandis que mon frangin revenait vers moi les bras encombrés d'un plaid, une tasse de chocolat chaud en mains.
-J'ai pensé que cela te ferait plaisir, m'adressa-t-il en souriant tandis que je m'asseyais à ses côtés sur le canapé, déposant sans aucune pensée pour ma précédente interlocutrice mes pieds sur la table basse, m'attirant un regard désapprobateur de la part de l'ange contre qui j'étais appuyée.
-Gabby, tu ne devrais pas ...Commença-t-il, avant que je ne l'interrompe.
-Je suis chez moi, je fais ce que je veux, arguais-je d'un ton ferme qui ne laissait pas place à la discussion. Aussi laissa-t-il de côté le sujet, pour m'interroger sur ma journée, tout en entreprenant la difficile mission de recoiffer mes cheveux, qui s'étaient emmêlés sous la pluie torrentielle qui tombait ce jour-là.
- ...Et là je lui ai répondu que je n'en avais rien à foutre ...expliquais-je emballée, à l'aide de grand geste la situation qui s'était présentée à moi ce matin dans ma classe de CM1.
-Le langage Gabrielle, le langage, me rappela Wesley amusé tandis que je témoignais de mon mécontentement par un léger grognement.
-Jill me répète toujours la même chose, tu ne vas pas t'y mettre toi aussi ! me plaignis-je tout en cachant mon visage dans son pull en laine, le tissu caressant doucement ma joue tandis que je me blottissais contre mon frère.
-Jillian est une jeune fille sage et intelligente, tu devrais suivre son exemple, me conseilla-t-il alors, mon corps se raidissant instantanément à l'écoute de cette simple phrase en apparence innocente, mais qui avait toujours eu le don de créer une sensation de malaise en moi, chaque fois que je pouvais l'entendre. Evidemment, lorsque cela n'était pas Wesley, le modèle de perfection qui suivait dans la liste devait être ma meilleure amie d'enfance, qui, depuis toujours, avait toujours incarné l'exemple idéal de la jeune fille de bonne famille, celle que l'on avait attendu de moi que je sois malgré mon refus catégorique d'endosser ce rôle, qui n'était tout simplement pas fait pour la demoiselle au caractère flamboyant que j'étais. Pourtant, ce trait dominant de sa personnalité ne nous avait jamais empêché de nous entendre comme des sœurs, celles que nous n'avions jamais eues. Au contraire, c'est sans doute grâce à nos personnalités aux antipodes l'une de l'autre que nous nous sommes rencontrées, suite à une dispute enflammée avec ma meilleure amie précédente, au sujet de la plus belle élève de primaire -qui bien entendu ne pouvait être que moi, la question ne se posait plus à ce niveau là. Envoyant balader celle qui avait osé nier mes qualités indéniables, j'avais crié haut et fort me trouver une meilleure amie qui elle, saurait reconnaitre la princesse que j'étais véritablement. C'était alors sur une petite tête brune aux cheveux charbon semblables aux mien que mon choix s'était porté, lui imposant, sans même lui demander un seul instant son avis sur la question notre nouvelle relation. Je ne la connaissais ni d'Eve ni d'Adam, mais si elle faisait parti de l'école élitiste dans laquelle nos parents nous avaient inscrits Wesley et moi, c'est qu'elle devait être riche, et un minimum intelligente -cela suffisait à mon égo encore blessé, qui ne demandait qu'à être conforté par la présence d'une personne autre que mon adorable frangin, qui ne pouvait être constamment près de moi. Ce fut à mon plus grand contentement qu'elle accepta sans broncher, occupant des années durant un rôle que je l'avais forcée à prendre sans pour autant considérer cela comme un fardeau ou quelque tache ardue, se contentant de démontrer une affection sincère, qui eut le don de me désarçonner. Cela n'avait jamais été supposé se dérouler de la sorte -jamais je n'aurais du m'attache à qui que se soit d'autre que mon frère. Les gens n'étaient pas digne de confiance -preuve en était que mes parents nous avaient abandonnés tout deux aux mains de parfaits inconnu pour la simple et bonne raison que leur préoccupation première se situait dans l'avancée de leur carrière bien plus que dans l'évolution de leurs enfants. Je savais que je n'aurais pas du faire confiance à cette enfant à la bouille d'ange, et pourtant, je le désirais de tout son cœur. La vie ne m'aurait-elle pas paru bien plus légère en ayant quelqu'un auprès de qui me confier, quelqu'un pour la partager ? Cédant à la tentation, j'avais laissé la demoiselle entrer dans ma vie, pour devenir aujourd'hui l'un des éléments les plus importants de mon existence. Mais c'était lors des moments de ce genre que je venais à m'interroger, à me poser la question suivante : si la jeune fille comptait tellement pour moi, pourquoi donc cela faisait-il si mal d'entendre mon frère vanter ces qualités dont je ne pourrais moi-même jamais faire preuve ?
Ain't it fun when you tell her she's just a cunt ?
-C'est fini, j'arrête tout, avais-je lancé, les bras croisés sous ma poitrine pour éviter de les laisser pendre le long de mon corps, tandis que je tentais d'appuyer mes propos d'un ton ferme, qui ne laissait pas place à la discussion.
Malgré le sérieux que je m'étais efforcée d'afficher, mon interlocutrice s'était contentée de se moquer bêtement de mes paroles, l'écho de son rire retentissant dans la pièce, alors que je me contentais de la fixer, attendant le moment où je pourrais enfin en placer une.
-Contrairement à toi, cela ne m'amuse pas, lâchai-je en l'observant peu à peu reprendre son calme, une expression de dégoût se peignant sur son visage aux traits semblables aux miens.
-Tu n'y penses pas, se contenta-t-elle de me répondre, balayant mes dires d'un simple geste de la main. Tu n'as ni licence, ni baccalauréat. Ton frère ...
Je la coupais avant qu'elle ne puisse aller au bout de son idée, par la phrase que j'avais tant de fois brûlé de lui cracher à la figure.
-Je ne suis pas Wesley, le lycée, l'université, ...Tout ça, ce n'est pas pour moi, m'expliquai-je en accompagnant mon discours d'un haussement d'épaule nonchalant. J'y ai bien réfléchi, tu sais. Je ne veux pas continuer comme ça, je perds mon temps.
Son visage se tordait d'une grimace démontrant tout le mépris qu'elle pouvait ressentir à mon égard, quand les mains qui sous le choc étaient venues couvrir son visage étaient retombée, me laissant admirer sa réaction loin d'être inattendue : il était clair pour moi qu'il aurait fallu bien plus que quelques mots pour convaincre ma génitrice d'accepter mon choix -bien que je n'avais alors que faire de son accord à présent que ma décision avait été prise. Ce n'était certainement pas un parent absent qui aurait pu se permettre de me faire la leçon sur mes choix de vie, à laquelle elle n'avait jamais participé même indirectement. Cela, seul mon frangin en avait gagné le privilège, dont il n'usait pas comme ma génitrice comptait le faire de son prétendu statut de mère.
-Tu ne t'attends tout de même pas à recevoir ma bénédiction, ma fille ? M'interrogea-t-elle, intriguée par la détermination dont je pouvais faire preuve, comme le prouvait la lueur d'intérêt qui était apparue dans son regard de glace.
-Je n'en ai rien à faire de ton avis, maman, répondis-je en insistant ironiquement sur ce dernier nom, faisant ainsi écho à la tournure de sa précédente phrase. Nous étions deux à pouvoir jouer ce jeu là -mais cela, elle l'ignorait encore.
-Cesse donc tes enfantillages Gabrielle, tu es bien trop vieille pour t'amuser avec les sentiments de ta pauvre mère, continua-t-elle, me forçant à lutter contre le sourire qui menaçait d'apparaitre sur mon visage.
-Tu ne l'es apparemment pas assez pour comprendre que j'avais uniquement crû bon de te prévenir de la suite des événements, certainement pas te demander des conseils. Les tiens ? Je n'en veux pas. Je ne veux pas de ton monde, de cette petite vie parfaite que tu proposes de m'offrir.
Son prochain commentaire, je m'y étais attendue, alors que l'honneur et la fierté, j'avais appris à le comprendre, étaient bien les deux seuls et uniques principes qui pouvaient revêtir de la valeur à ses yeux, bien au delà de sa prétendue affection pour ses propres enfants.
-Je ne te laisserai pas salir le nom de notre famille à cause de tes erreurs de jugement. Arrêter les études à cet âge, tu t'entends ? M'interrogea-t-elle en levant les yeux au ciel, tout en secouant légèrement la tête, traduisant le sentiment d'incrédulité qu'elle pouvait ressentir en l'instant.
-Tu ne vaudrais pas mieux que ces misérables étudiants de banlieue, ma mère finit par conclure, me défiant de lui prouver par quelque argumentation que ce soit la fausseté de ses propos. Mais ce plaisir, je ne le lui donnais pas, utilisant une carte dont elle ne m'aurait certainement pas cru capable alors que je soulignai un fait qu'elle-même ne pourrait nier.
-Qui possèdent bien plus de valeurs que mes actuels camarades de classe, qui ne mériteraient pas même un seul regard de ma part, riai-je en observant son visage changer radicalement d'expression au fur et à mesure des injures que je pouvais proférer à l'encontre de ceux qui composaient à toutes deux nos cercles d'amis communs. Tout ces gens, cette vie, cela faisait parti de son monde idéal, de cette petite existence parfaite qu'ils avaient, avec mon père, montée de toute pièce, à l'aide d'un compte en banque bien rempli et de relations réfléchies. Tout cela était loin d'être la spontanéité et le naturel que je recherchais, lassée de la routine abrutissante et malsaine qui avec le temps, avait commencé à m'étouffer progressivement. Ce mode de vie, elle l'avait imposé à ses deux enfants, sans même leur donner leur avis sur la question, comme le voulait la tradition Divinovish. Nous étions supposé suivre un schéma bien précis, supposé nous mener à la réussite sans possibilité d'échec : l'école prestigieuse dans laquelle nous avions tout deux été envoyés, les révisions intensives qui nous étaient imposées, la culture inculquée de force, abandonnés comme nous l'étions entre les mains des meilleurs enseignants du pays, dont le talent en la matière n'était à présent plus à prouver depuis longtemps; cela ne m'avait tout simplement pas suffi -était-il si impensable de désirer plus de la vie qu'une multitude d'étapes déjà programmées à l'avance, plus qu'un destin déjà tout tracé auquel il était en apparence impossible de se dérober ?- Je n'étais pas comme mon frère, excité à l'idée de me lever chaque matin pour apprendre des choses que j'avais déjà mémorisées depuis longtemps ou dont je n'avais strictement rien à faire. Je n'avais pas besoin de tout cela afin d'améliorer mes capacités intellectuelles. Je me savais déjà bien plus douée que la plupart de mes camarades, alors à quoi bon persévérer sur une voie qui ne m'apporterait rien de plus que des journées placées sous le signe de l'ennui ? Je laissais volontiers cela à mon ainé qui semblait se complaire dans cette existence sans attraits, appréciant son cursus universitaire bien plus que je ne pourrai jamais aimer mon programme de lycéenne.
-Je pourrais me lancer dans la musique -tu sais bien que j'aime ça. Cela me plairait bien plus que mon école actuelle. Il y a un conservatoire pas très loin de la maison qui donne des cours de chant, je pensais ...Commençais-je à proposer, dans l'espoir que cette alternative puisse suffire à la satisfaire ou -dans le pire des cas envisageable- à calmer la colère qui commençait à bouillir en elle.
-Et puis quoi encore ? Bientôt tu m'annoncera que tu veux faire le trottoir ? Après tout, c'est bien le seul moyen que tu auras de te payer tes leçons ridicules. La musique n'est pas un métier -c'est un hobby tout au plus. Un loisir que je serais ravie de financer si tant est que tu reprennes ton sérieux un instant, et ravales toutes les paroles irréfléchies que tu viens de proférer, s'exprima-t-elle d'un ton ferme et cassant, visant à vexer bien plus qu'à ramener à la raison, mais qui n'eurent pour seul effet que de me fixer sur ma position -il était définitivement hors de question de revenir en arrière à présent que j'avais enfin trouvé le courage d'exprimer ce que j'avais si longtemps tu. Si elle même n'avait pas osé protester auprès de sa propre génitrice et s'était accommodée de ce traitement, je ne comptais pas rester les bras croisés à voir défiler ma vie devant moi -j'étais encore jeune, tant de possibilités s'offraient à moi, que je n'aurais jamais l'occasion de rendre réelles si je ne me bougeais pas le cul pour faire avancer les choses, comme l'alcool que j'avais pu ingurgité avant de m'adresser à ma mère me le permettait à présent. Loin d'être totalement déchirée, les quelques verres de Vodka que je m'étais enfilés m'avaient aidée à placer des mots sur ce que je n'aurais préalablement pu décrire, me poussaient à continuer dans mes efforts, sans regretter un seul instant mes actions ou paroles déplacées -j'étais seule maitresse de mon destin.
-Je préférerai cent fois jouer la pute que de rester un seul instant de plus en compagnie d'une lèche-cul comme toi, avouai-je sans mâcher mes mots. Je devais parvenir à lui faire comprendre que la musique n'était pas qu'une vulgaire folie du moment. C'était ma passion aussi bien que le journalisme était la sienne -et je comptais bien la vivre, avec ou sans son aval.
Cela, elle sembla enfin l'assimiler lorsque mes mots parvinrent enfin jusqu'à elle, la stupeur la faisant presque reculer d'un bond. Si j'avais pris l'habitude de ne lui démontrer aucun respect -encore fallait-il qu'elle le mérite - jamais je ne l'avais insultée directement de la sorte, nos interactions habituelles constituées principalement de critiques basées sur des divergences de points de vue. Mais, prise dans ma lancée, je me sentais pousser des ailes, tandis que je me libérais petit à petit de la toile d'araignée au sein de laquelle j'avais vu le jour.
-Au moins moi, je serais payée pour ça, conclus-je, un rictus mauvais retroussant les commissures de mes lèvres écarlates.
Une fois de plus, je la laissais encaisser mes propos, tandis que je me mis à marcher dans la pièce, tournant autour d'elle tout en enchainant mon monologue, sans prendre le temps de réfléchir, préférant laisser courir le flot de mes pensées qui s'échappait de mes lèvres sans que je ne puisse le retenir.
-Ce serait tout benef' pour toi : tu n'aurais plus à supporter ma présence durant les diners de famille annuels, plus besoin de présenter le vilain petit canard à tout tes amis du journal -ce ne serait pas cool, ça ?-, sans compter le fait que je ne constituerais plus pour ton fils adoré un obstacle sur le chemin de sa réussite, lui expliquais-je calmement, listant tous les avantages que présenterait mon départ de la maison, dépliant un doigt pour chaque nouvelle idée.
-Les gens se poseraient des questions, contra-t-elle, la crainte altérant sa voix qui tremblota lorsqu'elle vint à reprendre la parole.
L'avis de ses semblables, bien entendu. Il fallait absolument maintenir les apparences, pour peine de se voir rejeter de la haute société. J'aurais du me douter que là serait sa principale préoccupation -loin d'elle l'idée de s'inquiéter un seul instant de savoir sa fille âgée de seize ans à peine à la rue.
-Ca, c'est ton problème, pas le mien, lui répondis-je tout en me dirigeant vers la porte menant vers l'extérieur. L'entrouvrant délicatement afin de lui faire savoir mes intentions, je lui lançais un dernier regard amusé.
-J'me casse, pouffiasse.
Ain't it fun when you get so high well... that you just can't come ?
-Faites place à la petite nouvelle de la famille, la magnifique Gabby ! Annonça la voix amplifiée du guitariste, tandis que le reste du groupe installait le matériel.
Dire que je redoutais ce moment aurait été un euphémisme, alors que, malgré l'apparente assurance que je m'efforçais d'afficher auprès de mes collègues, assis à mes côtés dans les coulisses en attendant ma prestation, mes membres ne demandaient qu'à trembler sous la pression. Certes, j'étais bonne dans ce que je faisais, et cela, je ne l'ignorais pas; mais faire face à une telle foule pour la première fois me foutait la trouille, sans que personne ne puisse rien faire pour calmer mes nerfs à cran.
-C'est à toi, me rappela le patron de la salle dans laquelle je m'apprêtais à chanter, en m'adressant un large sourire rassurant.
-Les première fois sont toujours difficiles, mais tu vas voir, tu vas t'éclater ma grande.
C'est en m'efforçant de croire à ces quelques paroles que je m'étais engagée sur scène, en espérant ne pas perdre contenance devant les centaines d'yeux fixés sur ma personne. Conservant ma maitrise de moi-même, j'avais saisi le micro, et, non sans avoir saluer au préalable le public, annoncé par la suite le programme de la soirée. J'avais jeté un regard à mes musiciens, attendant un signe de leur part signifiant le début du premier morceau que nous allions interpréter -si les gars avaient l'habitude d'effectuer cette performance chaque soir, j'étais tout juste intégrée dans ce monde qui m'avait jusque là été inconnu. J'avais assisté à des festivals, concerts, et autres spectacles musicaux, jusqu'à la petite démo dans le garage miteux d'une connaissance des quartiers les moins bien réputés de la ville, mais chanter moi-même, ça, c'était une première. Dire qu'il avait suffi de quelques clics pour que j'atterrisse malgré moi dans cette bâtisse miteuse, qui en quelques semaines était devenue ma seconde maison ! On aurait tenté de me faire croire une chose pareille que j'aurai rit au visage de mon interlocuteur. En effet, ce bar n'avait au premier abord aucun intérêt particulier -délabré et grisâtre, il n'attirait pas l'œil des passants, ni même la curiosité. Moi-même étais-je déjà passé devant sans m'arrêter un seul instant afin de me renseigner sur celui-ci -après tout, pourquoi aurais-je perdu mon temps dans de tels endroits ?- J'avais certes réévalué mes habitudes de vie après avoir quitté la maison, mais je restais un membre assez important de la société pour m'offrir beaucoup mieux que ce proposait cette salle de concert de fortune, qui était bien loin de tout ce que j'avais pu m'imaginer. Sauf que voilà, les liens avec ma famille rompus, tout aussi bien que mes vivres, au moment même où j'avais passé la porte notre villa, je m'étais rapidement trouvée dans l'obligation de trouver l'argent nécessaire à la location d'un appartement, de manière à ne pas avoir à crécher chez ma meilleure amie, dont les parents -adorables et compréhensifs, il fallait tout de même l'avouer- se seraient vite lassés de ma présence. Alors, nous nous étions lancés sans trop réfléchir -pour ma part, il en va de soi- à la recherche d'un petit boulot, assez bien payé pour pouvoir nous permettre de trouver un logement décent -avec le train de vie que nous menions toutes les deux, nous avions beau être peu exigeantes, il était tout simplement hors de question de dire adieu au petit confort auquel nous étions habituées. Si Jillian s'était tournée vers le mannequinat, mon choix s'était porté automatiquement vers la musique, domaine dans lequel j'avais tout fait pour réussir, malgré la réticence non dissimulée de ma mère, qui n'avait jamais considéré au sérieux ma passion "ridicule", d'après ses propres mots. Alors, utilisant la technologie du 21ème siècle, j'avais tapé quelques mots dans ma barre de recherche google, pour finalement trouver ce petit coin sympa -bien que nécessitant de nombreuses rénovations- qui m'avait acceptée malgré mes seize ans tout juste atteints, sans me poser une seule question concernant la raison de ma venue ici.
-Tout le monde ici possède son propre passé. L'important chez moi, c'est de travailler à son futur, m'avait répondu le propriétaire, lorsque intriguée par son manque de curiosité, je l'avais interrogé à ce sujet.
Tant que je menais ma mission à bien, comme tous les autres musiciens du groupe, je n'avais rien à craindre, qu'il m'avait dit. Ce jour là, j'avais su pouvoir le croire. Aujourd'hui encore, malgré la panique qui semblait vouloir me gagner, je le faisais. S'il avait confiance en moi, si ma meilleure amie, présente dans le public, avait confiance en mon talent, alors je ne devais pas les décevoir.
Ouvrant la bouche pour laisser passer les premières notes de la chanson, je me forçais à garder les yeux ouverts, sans pour autant scruter les réaction de l'audience, comme mon instinct me poussait naturellement à le faire -je n'étais plus dans ma chambre devant le miroir, j'avais un véritable public à satisfaire. Poussée par l'adrénaline, je donnais tout ce que j'avais, jouant avec les personnes présentes dans la salle, amusant jusqu'au bassiste qui laissa échapper un rire résonnant dans toute la salle en réponse à l'une de mes plaisanteries. C'est à ce moment là que je sus que j'avais enfin trouvé ce que je voulais faire de ma vie -pour une fois, je me sentais réellement chez moi parmi ces gens que je ne connaissait ni d'Eve et d'Adam -et après tout ce que j'avais pu supporter durant mon enfance, j'avais l'impression de respirer de nouveau. Ils ignoraient mon identité comme j'ignorais la leur -ils ne pouvaient pas me juger comme ma famille pouvait le faire, ce dont je n'hésitais pas à profiter du mieux que je le pus.
Enchainant soirées et beuveries sans me laisser un seul jour de répits, je m'amusais par la suite à accompagner les garçons du groupes dans leur tournée des bars après chaque concert, quitte à finir la nuit chez l'un d'entre eux, lorsque mes jambes n'étaient plus en état de me porter, et que le monde autour de moi commençait à tourner. Ce qui pouvait bien m'arriver ? Je m'en moquais comme de la dernière pluie, tout ce que je voulais, c'était profiter de la vie dont on m'avait privée durant si longtemps, sans me préoccuper du lendemain. En cela, mon esprit rencontra rapidement celui du guitariste qui m'accompagnait sur scène, partageant le même caractère fougueux qui nous poussa dans les bras l'un de l'autre. De quelques baisers échangés dans les loges suivit une nuit torride qui acheva de fixer les règles de notre romance, que nous ne pouvions nous résoudre d'achever sur une note si positive. J'étais bien avec lui, comme il l'était avec moi -cela n'aurait été qu'un véritable gâchis de laisser tomber l'une des seules personnes capables de me faire sentir vivante dans la vie de débauchée dans laquelle je m'engageais progressivement. Mais les choses étant toujours plus compliqué qu'elles ne paraissent, les sentiments vinrent s'ajouter à l'équation, si bien qu'ils nous suffit de quelques mois seulement avant de craquer, et de possessivement réclamer l'exclusivité de notre relation. Jalouse comme je l'étais, je n'avais pu supporter bien longtemps ses échanges plus que cordiaux avec les -peu nombreuses, Dieu soit loué- clientes du bar, tout comme les altercations entre mon amant et les hommes qui avaient le malheur de démontrer d'un peu trop d'attention envers moi se faisaient régulières, si bien qu'il eut droit aux remontrances du patron, qui n'hésita pas à lui faire entendre son point de vue sur la question, son comportement irréfléchi qui provoquait en moi des frissons faisant baisser considérablement la popularité de l'établissement déjà en difficulté financières. Finalement, il était mien, et j'étais sienne; et à mes yeux rien n'avait plus d'importance.
Ain't it fun when your friends despise what you become ?
Assise sur le corps de mon petit ami, mes jambes enserrant sa taille, je cherchais vainement une façon de lui faire oublier le mouron qu’il se faisait concernant l’après midi à venir. Ma tête enfouie au creux de son cou, ma langue tout contre sa peau, je tentais de le distraire, le faisant se concentrer sur moi, et le plaisir que je pouvais sans effort lui procurer à la place de ses inquiétudes infondées.
Les yeux fermés, et la tête rejetée en arrière en réaction à mes caresses, je le voyais s’efforcer de profiter du moment présent, tandis que mes mains en premier lieu positionnées sur son torse nu s’aventurèrent plus au sud, jouant nonchalamment avec la boucle de la ceinture en cuir retenant le jeans bleu qui lui allait si bien, moulant son corps musclé juste comme il le fallait .
Bientôt –comme je l’avais présagé- chaque pensée qui se formait dans son esprit tordu par le plaisir était dirigée vers moi, le surnom qu’il m’attribuait habituellement s’échappant involontairement de sa bouche, sans qu’il ne puisse rien y faire pour l’en empêcher.
Mes lèvres, occupées à présent à meilleur escient n’eurent plus besoin de murmurer quelque paroles positives afin de le rassurer : je savais que grâce à moi, ses tracas seraient oubliés, tout du moins pour un temps, ce en quoi je me félicitais, bien que cela ne soit pas là un grand exploit. Je savais que, tout comme l’effet que le garçon avait sur moi était enivrant, Nate ne pouvait résister à mon charme et mes étreintes sensuelles.
Comme pour confirmer ma théorie, ses doigts trouvèrent ma chevelure dans laquelle ils élurent domicile, s’y emmêlant férocement tandis que je fondais doucement en sentant le courant d’électricité qui me parcourait à chacun de ses touchers me traverser de la tête au pied. Résistant à l’envie de satisfaire mes propres besoins et de laisser cours à mes pulsions, je me concentrais sur ma mission en me souvenant que c’était lui et lui seul qui avait besoin de se détendre pour pouvoir faire face à la rencontre qu’il redoutait tant.
Malgré tout ce que j’avais pu lui confier au sujet de mon ainé –notamment son irréprochable obéissance aux lois, et son ouverture d’esprit nécessaire lorsqu’on considérait le fait qu’il devait chaque jour pouvoir gérer la sœur dévergondée que j’étais-, il continuait à s’alarmer quant à la réaction que celui-ci pourrait avoir à son égard.
Si j’avais pensé que celui-ci balaierait ses inquiétudes rapidement, eh bien le moins qu’on puisse dire était que j’avais eu faux sur toute la ligne. Je n’avais pas encore décidé si je devais m’en préoccuper ou en être immensément flattée, mais le fait est que mon ami semblait prendre cette rencontre au sérieux.
Encore une chose qui plairait à Wesley, songeais-je en imaginant parfaitement mon frangin donner son approbation à Nate concernant notre relation –bien que nous n’ayons pas attendu son avis avant de nous lancer corps et âme dans cette aventure pour le moins déconseillée.
J’étais une Divinovish, un membre de la haute société, tandis que les membres de la classe moyenne comme mon amant n’étaient que des pions sur l’échiquier des grands que nous incarnions. Pourtant, jamais encore je n'avais laissé ceux-ci contrôler le cours de mon existence, ce n’était pas aujourd’hui que cela allait commencer –pas alors que j’avais peut-être trouvé la seule personne dont je ne me lassais de l’affection.
Perdue dans mes pensées, j’entendis à peine la sonnerie provenant de l’interphone annonçant l’arrivée tant attendue et pourtant si appréhendée de mon frère, le son étouffé par les grognements et gémissements de plaisir de mon homme.
Ce que nous ne manquâmes pas en revanche fut l’avertissement de Jillian, ma meilleure amie et colocataire qui, prévenante, nous indiqua de faire en sorte de nous rendre présentable le temps qu’elle aille ouvrir à notre invité.
-Merde, cracha Nate tandis que je me séparais de lui.
Je ne sus pas si cela était du au fait que la venue imminente de mon ainé nous stoppait dans ma tentative de distraction ou si son malaise reprenait, ses angoisse revenant en masse maintenant que leur face à face était inévitable, mais il était certain, à la pâleur de son visage et au regard nuageux et troublé qu’il portait à présent sur moi qu’il aurait préféré être ailleurs en cet instant.
De mon côté, j’étais plutôt confiante, ce qui ne m’empêcha pas, me léchant les lèvres par reflexe, de me mettre à la recherche de mon tee-shirt, ce qui n’échappa pas à mon amant qui continua à m’observer sans un mot, une lueur de désir dansant telle une flamme solitaire au fond de ses pupilles azur.
Levant les yeux au ciel, je lui adressais un sourire moqueur avant de lui lancer son propre vêtement manquant en pleine figure, lui intimant silencieusement de se rhabiller.
- Dépêche-toi imbécile. Ne me force pas à t’enfiler moi-même ce haut.
Alors qu’il me répondait en faisant la moue, je ne pus m’empêcher de déposer un léger baiser sur ses lèvres, ne pouvant résister à son expression craquante.
Lorsqu’il me relâcha sa main s’attarda sur ma joue qu’il parcourut de ses doigts rugueux dus à une pratique fréquente de la guitare électrique. Cela, au moins, mon frère ne pourrait le lui reprocher s’il venait à entrer à l’improviste -J’avais beau avoir entièrement confiance en ma meilleure amie pour me couvrir, je doutais qu’elle puisse tenir encore bien longtemps sans que mon ainé ne se pose des questions.
En effet, il n’aurait rien à redire à la situation, si tant est que je me vêtisse de manière convenable de nouveau ; ce qui m’était pour le moment impossible compte tenu du fait que je n’étais plus en possession du haut qui me manquait.
En baissant les yeux sur ma poitrine uniquement couverte d’un soutien-gorge violet en dentelle, Nate parut s’en rendre également compte : déposant une flopée de légers baisers sur la peau mise à nue, il consentit à me rendre mon vêtement, qu’il fit sans difficulté passer par dessus de ma tête pour lui faire regagner sa place d’origine, le faisant glisser sur mes flancs non sans les frôler du bout des doigts, jusqu’à ce qu’il ne soit interrompu par la voix de Wesley sollicitant ma présence afin de le saluer comme il se doit.
En réponse à sa demande, je tentais de me redresser seulement pour me faire stopper par mon ami qui saisissant habilement quelques mèches de mes cheveux, les remit en place de manière à ne rien laisser paraitre de nos précédentes occupations.
- Tu devras te contenter de cela pour l'instant bébé, lui dis-je en souriant alors que nous nous levâmes tout deux pour nous diriger vers l’entrée de l’appartement.
- Je m’y ferais …pour le moment en tout cas, me répondit-il avant de passer un bras autour de ma taille, pressant mon corps fin contre le sien dans un geste à la fois possessif et protecteur que j’avais toujours trouvé extrêmement sexy.
Bientôt, nous vîmes la joyeuse tête blonde de mon frère sur laquelle, en me voyant, se planta le sourire fier et idiot de tous les grands frères poule de la terre.
Me libérant de l’emprise de Nate, je courus sauter dans ses bras, l’écrasant contre moi en riant, tandis que gêné, celui-ci se contentait de me tapoter le dos timidement.
- Ca faisait trop longtemps, me plaignis-je d’une voix enfantine. Tu devrais nous rendre visite plus souvent ! C’est ce que l’on avait convenu lorsque Jill et moi avons pris l’appartement.
Il se gratta la tête, reflexe qu’il tirait de notre géniteur, avant que finalement les mots ne sortent de sa bouche.
- Je n’ai vraiment pas eu l’occasion ces derniers temps, je suis désolé. Avec tout le boulot qu’on nous donne, en ce moment, je ne m’en sors pas.
En observant son visage de plus près, je pus constater qu’il disait vrai –non que je ne ressente le besoin de vérifier qu’il ne me mentait pas. Je savais pertinemment que s’il avait vraiment eu la chance de se reposer un tant soit peu, il l’aurait sacrifié pour passer du temps avec moi-. Ses yeux d’ordinaires lumineux étaient assombris par de vilains cernes violettes qui, sous ses paupières accentuaient l’impression de fatigue immense que donnait sa pâle figure.
Sans doute sentit-il mon regard fixé sur lui puisqu’il se sentit obligé de détourner la tête pudiquement, détestant montrer –surtout à sa petite sœur pour laquelle il semblait avoir pris le rôle de chevalier blanc- quelque signe de faiblesse.
- Tu devrais faire une pause, lui conseillais-je inutilement.
En effet, il était certain que mes paroles ne changeraient rien à la situation. S’il ne pouvait pas récupérer ses nuits, ce n’était pas parce qu’il ne le voulait pas mais parce qu’on ne lui en laissait pas l’occasion, tout simplement. S'il y avait bien quelque chose que je ne supportais pas, c’était que l’on tente d’exploiter mon frère, ce qui je le savais comme chose certaine, se produisait à chaque fois. Ce modèle de pureté et de générosité ne savait tout simplement refuser quoi que ce soit, encore moins à ses supérieurs. Poussé comme il l’était pas notre père à faire parti, comme chaque homme de la famille auparavant, du conseil d'administration, ses collègues ne lui laissaient aucun répit, profitant de son manque de hargne pour lui imposer des règles d’autant plus strictes ainsi que des missions des plus retors, alors même qu’il n’occupait qu’un poste d’assistant auprès de notre père.
Si cela ne tenait qu’à moi, je leur en aurais sans doute touché deux mots, et certainement pas afin d’échanger des paroles courtoises. Mais tout comme Wesley respectait mon choix de vie, je m’efforçais d’accepter- plus ou moins- le sien, et de faire en sorte de ne pas lui porter préjudice dans ses ambitions idiotes. Il n’empêche que je ne manquerais pas d’en faire la remarque à quelques connaissances, histoire de lui faciliter un peu l’existence, ne serais-ce que pour un moment. J’étais sûre de parvenir à marchander quelques services en échange de sa tranquillité d’esprit. Si j’y parvenais, ce ne serait que peu cher payé.
En pleine réflexion, je ne m’aperçus pas que le regard de mon frère avait dévié vers celui de mon amant, expliquant le silence qui s’était installé parmi notre petite assemblée.
Sans pour autant paraître malveillant, mon ainé le jaugeait de la tête au pied, essayant en un regard d’évaluer celui-ci. Le connaissant, cela n’était qu’un premier examen, et non pas un avis définitif. Il savait, tout comme moi que cela ne suffisait pas à juger un être.
Pourtant, comme tous, il y accordait tout de même de l’importance, ce que j’avais prévu, conseillant à Nate de reléguer pour un jour ses jeans déchirés aux placards pour adopter une tenue plus classique et passe partout mais néanmoins décontractée, comme celle qu’avait choisi Wesley.
Aujourd’hui vêtu d’un pull bleu que je lui avais offert à l’occasion de l’un de ses nombreux anniversaires, qui mettait ses yeux clairs en valeur, ainsi que d’un pantalon noir en tissu fin, il incarnait la classe à l’état pure, sans toutefois en faire de trop : nous n’étions pas à une réunion du conseil général, aucune formalité n'avait jamais été nécessaire lorsqu'il passait notre porte. Se rendre présentable était pourtant une habitude qui n'avait jamais quitté Wesley, et qui faisait aujourd'hui parti intégrante de sa personnalité d'homme adulte : s'il y avait bien un reproche que l'on ne pouvait lui adresser, sans doute cela serait-il son manque d'élégance. Alors même que vêtu de simples vêtements de villes et non des costumes d'apparat dans lesquels on pouvait le trouver lors des assemblées administratives, il semblait incarner rien que par son apparence la puissance et l'autorité que lui attribuait son rang de futur président d'entreprise; ce qui ne manqua pas d'intimider mon amant, remarquais-je dans l'instant.
Il ne l'aurait jamais avoué, que cela soit en présence de mon ainé ou en huit-clos, son orgueil gouvernant encore sa raison, mais ma connaissance poussée de ses réactions corporelles et faciès m'indiquèrent de par ses muscles tendus et ses mouvements de jambes, reléguant son poids d'un pied à l'autre, que l'image de pouvoir néanmoins pur mais non pas pour autant négligeable de mon ainé lui foutait carrément les jetons.
Certes avait-il l'habitude de côtoyer des personnes de mon monde, Jillian faisant partie intégrante de ma vie depuis déjà des années jouant aujourd'hui le rôle de colocataire dans l'étroit -mais cependant confortable- appartement qui servait de lieu d'accueil à nos rendez-vous nocturnes. Mais nous n'étions, placés auprès de la classe et du raffinement de mon frère, que de piètres apprenties. Si rien en nous -excepté peut-être notre attention particulière à notre physique et les valeurs que nous étions supposées posséder- ne reflétait notre appartenance à la haute société, Wesley était le portrait même de ce que l'on attendait des enfants de riches. Des cheveux blonds à la clarté pure, aux yeux bleu caractéristiques à la famille Divinovish et ce depuis des siècles, le moins qu'on puisse dire, c'est que mon adorable grand frère en jetait. Cela, je n'en étais pas peu fière.
-Heureux de te rencontrer, mec, salua alors mon ami, en tentant de soutenir les yeux scrutateurs de mon frangin, brisant volontairement le silence gêné qui s'était installé durant l'examen rapide que ce dernier avait fait du nouveau garçon qui apparaissait sur ma liste de chasse.
A présent que le dialogue était rétabli, tous les yeux se fixèrent sur les deux interlocuteurs, Wesley, qui semblait encore réfléchir à la meilleure façon d'agir, et Nate, qui, la main tendue dans le but évident de serrer celle de mon ainé, avait choisi de faire le premier pas afin de démontrer à notre invité ses bonnes intentions à mon égard. Sachant que ses yeux ne se détourneraient pas de son objectif, et cela même pour me lancer un regard complice, je me contentais de me rapprocher de son corps, sans toutefois porter atteinte à la bienséance que souhaiterait sans aucun doute conserver mon frère -si me voir pratiquement ne faire qu'un avec mon copain était chose courante pour Jillian, même si rien que l'idée la faisait pourtant rougir, je doutais que mon frangin tolère de tels actes en sa présence- faisant glisser mon bras fin derrière son dos noué par l'angoisse, de manière à l'apaiser en dessinant des cercles de mes doigts.
Si je savais qu'il appréciait le geste, cela ne suffit tout de même pas à lui faire abandonner l'inquiétude qui le contrôlait depuis le moment où l'idée d'une rencontre entre les deux hommes de ma vie m'était venue à l'esprit. Sans doute, me rendis-je compte alors, Wesley avait-il partagé ses ressentiments malgré son assentiment. Rencontrer la personne qui s'amusait sexuellement avec sa sœur n'était sans doute pas la meilleure chose qu'il ait pu faire de sa journée. Je commençais sérieusement à regretter moi-même mon choix inconscient de réunir ces deux là lorsque mon frère prit la parole afin de finalement répondre, renvoyant la politesse malgré un ton pour le moins froid et distant.
-Le plaisir est partagé, répondit-il en retenant une remarque lorsqu'il surprit mon geste. Je suis Wesley.
Alors, avant que mon petit ami n'ait le temps d'ajouter quoi que ce soit, il se sentit obligée d'ajouter quelques paroles qui, si je ne connaissais pas la personnalité de mon frère bien plus que ma propre personne, m'auraient presque semblées porteuses d'une menace sous-jacente.
-Son grand frère.
Un sourire embarrassé se dessina alors sur le visage d'ordinaire détendu du brun qui se faisait visiblement violence afin de garder contenance face à cette atmosphère lugubre qui semblait s'abattre sur lui avant même qu'il n'ait eu le temps de rassembler ses armes. Sans doute avait-il saisi tout aussi bien que moi les sous entendus contenus dans la déclaration en apparence anodine de mon ainé. Aussi ne pus-je m'empêcher d'admirer son courage lorsqu'il ne se laissa pas démonter, et adopta un ton nonchalant afin de ne montrer aucun signe de faiblesse devant la créature qui l'inspectait de toute part.
-Je le sais, Gabby m'a beaucoup parlé de toi, dit-il en se forçant à conserver le rictus qui avait élu domicile sur sa figure tendue.
Le regard qu'il lui lançait à présent était bien plus curieux qu'hostile, alors qu'il continuait d'ignorer la poignée de main qui lui était offerte, forçant Nate a faire retomber timidement son bras contre son corps, cachant celle là même au sein de la poche avant de son jeans bleu, lui valant un regard désapprobateur de son examinateur.
-Je ne doute pas que Gabby ait du vous raconter toutes sortes de choses affreuses sur mon compte, lâcha-t-il dans un semblant de légèreté. Sans doute nous serions nous également amusés de son trait d'humour si ca remarque ne remettait pas en cause de manière indirecte la manière dont mon ami s'était précédemment adressé à lui. En le vouvoyant de la sorte, en plus de fixer de manière claire et concises les limites qu'il ne souhaitait pas dépasser, il plaçait mon amant dans une situation délicate, critiquant sa familiarité qui semblait aux yeux de mon ainé poser problème.
-Rien de tout ça. En fait, je crois plutôt qu'elle t', commença-t-il avant de se faire force pour corriger la tournure de sa phrase, de manière à ce que celle-ci convienne aux exigences de mon grand frère.
-Je crois qu'elle vous adore.
C'est à ce moment là que je me sentis obligée d'intervenir, ne pouvant supporter un instant de plus la tension qui s'était accumulée entre les deux dans l'antichambre, nous compressant bien plus que l'étroitesse de la pièce ne nous le permettait. Leur faisant alors noter ma présence parmi eux -chose qu'à mon plus grand désappointement, les garçons semblaient avoir oublié- je me plaçais symboliquement entre les deux adversaires, le bourreau et sa victime afin de calmer le jeu en utilisant tous les moyens qui étaient en ma possession afin de rétablir un semblant de paix -Bon dieu si l'on m'avait dit que je prononcerais ces paroles un jour ...
-Wow ...On se détend les gars. Pas besoin de tant de manières. Je pense que vous pouvez vous tutoyer maintenant que vous avez été présentés de façon officielle, m'exclamais-je en les taquinant sur leur attitude sérieuse qui en devenait presque risible.
Mais mes conseils n'eurent pas plus d'effet sur Nate que sur Wesley, qui m'ignorèrent tout deux, se contentant de me suivre silencieusement jusqu'au salon, prenant tout deux place -presque par reflexe- à mes côtés.
-Alors ...Que fais-tu dans la vie ? Interrogea finalement mon ainé, brisant le silence qui s'était installé dans la pièce.
-Je suis guitariste, répondit mon amant, avec une fierté non dissimulée, qui fit sourire mon frère.
-Je te parle d'un vrai métier, laissa-t-il échapper, certes, sans mauvaise intention, mais qui eut pour effet de laisser quelques instants bouche bée l'homme qui partageait ma vie.
-Professionnel. Guitariste professionnel, c'est ça mon boulot, expliqua-t-il gêné.
-Oh, se contenta de répondre mon frangin, avant que mon regard ne se pose sur le paquet de cigarettes posé sur la table basse.
-Gabrielle, je croyais t'avoir déjà dit que fumer n'était pas bon pour ta santé. Tu connais les risques pourtant, s'adressa-t-il à moi d'une voix douce, déformée par l'inquiétude.
Sans oser soutenir son regard, j'hésitais un instant à suivre le cours de ses pensées en jouant le jeu, protégeant ainsi mon petit ami déjà embarrassé par la situation. Mais celui-ci ne sembla pas considérer cette solution alors qu'il assumait pleinement la responsabilité de ses actes.
-Le paquet n'est pas à elle, lança-t-il, tout en tripotant nerveusement les cordons de son t-shirt.
L'attention de Wesley se reporta alors sur lui, tandis qu'il balaya ses inquiétudes d'un geste de la main.
-Je ne t'en tiens pas rigueur ! le rassura-t-il, lui adressant un sourire amical, avant de tenter une plaisanterie.
-Tant que tu ne m'annonces pas que tu es tatoué ou percé, tu n'as pas de soucis à te faire !
Le regard de Nate croisa alors le mien, tandis que nous tentions d'évaluer à quel point nous devions nous en faire concernant la fin de cette soirée déjà mal entamée.
-Eh bien, commença-t-il, en se grattant l'arrière de la tête.
Mais ces quelques mots suffirent à mon frère pour comprendre de quoi il en retournait. Jamais je n'oublierai l'expression de déception qui s'était peinte sur son visage à ce moment là.
Ain't it fun when you're always on the run ?
-Je t'assure que Jill ne rentrera pas avant au moins vingt heures ce soir, promis-je à mon petit ami, qui, tel un piquet sur le seuil de la porte, refusait de mettre un pied à la maison de peur de reproduire la catastrophique situation qui s'était produite lors de sa rencontre avec les deux personnes les plus chères à mes yeux. Certes, on ne l'avait pas mis dehors, mais les regards lancés par mon frangin accompagné de la silencieuse désapprobation de ma meilleure amie avait suffi à le convaincre d'écourter sa visite, me murmurant discrètement qu'il reviendrait plus tard, lorsque nous pourrions enfin passer du temps tous les deux sans que lui-même soit soumis à la tension insupportable que mes proches étaient parvenus à créer.
Il dut considérer mes dires comme honnêtes, puisqu'il se décida enfin à entrer dans notre étroit appartement, pour, non sans observer si ce que j'avais pu lui annoncer était vrai, finir par s'installer nonchalamment sur le canapé du salon, attendant impatiemment que je le rejoindre, tandis qu'il m'intimait de me dépêcher de refermer la porte. Moi même emplie d'une joie non masquée à l'idée de pouvoir le retrouver en dehors du cadre professionnel dans lequel nous évoluions tout deux, je balançais presque les clés dans le bocal à cet effet avant de me jeter littéralement dans ses bras, sans prendre la peine d'ouvrir les volets ou d'allumer la lumière, alors que déjà, ses lèvres avides se posaient sur les miennes. De longues semaines étaient passées sans que nous ne puissions obtenir un seul instant pour nous depuis la visite de Wesley, nous forçant à nous contenter de simples baisers rapides entre deux scènes, quant le programme chargé qui nous était imposé nous offrait la chance de nous croiser avant de rentrer chez nous éreintés, pour directement nous affaler sur nos lits. Si je n'aurais sans doute vu aucun inconvénient à inviter Nate pour la nuit -Jillian avait beau ne pas forcément apprécier ma nouvelle conquête, fidèle à elle même, elle n'avait jamais émit aucun commentaire lorsque je lui proposait de rentrer avec moi- je savais qu'il aurait été contreproductif pour nous deux de tenter dormir l'un aux côtés de l'autre alors même qu'il nous aurait été impossible de fermer les yeux en sachant pertinemment partager la même couche -perdre encore quelques heures de sommeil aurait été la possibilité la plus probable, sachant que mon amant ne m'aurait certainement pas laissé l'opportunité de me reposer, même si cela signifiait enchainer les tasses de café le lendemain, tout en arborant des mines fatiguées aux cernes visibles. Aussi n'avions-nous pas hésité un instant lorsque nous avions obtenu tout deux les mêmes jours de congés, gracieusement offerts par notre patron en récompense pour les longues soirées sans fin que nous avions réussi à animer avec seulement la moitié des effectifs, maintenant le chiffre d'affaire au beau fixe.
La seule chose à définir était restée le lieu de notre rendez-vous, moi, vivant avec une colocataire dont la seule préoccupation semblait être les études qui la forçaient à passer des nuits entières à travailler ses cours sans relâche, et lui, logeant encore chez ses parents, qui n'auraient sans doute pas apprécié voir débarquer une inconnue pour la journée, encore moins pour la laisser s'amuser avec son fils sous leur toit.
Autant dire que lorsque j'avais eut vent des plans de Jillian pour ce soir, je n'avais pu m'empêcher de ressentir une certaine satisfaction à l'idée que ma meilleure amie rentre assez tard pour ne pas nous déranger dans nos occupations. J'avais beau l'adorer, je ne pouvais tout simplement pas me passer de celui qui constituait ma nouvelle addiction.
-Gabby, m'interpella justement celui-ci, en se décollant de moi pour me permettre d'atteindre mon portable, vibrant sur la table basse pour m'annoncer la réception d'un nouveau message.
Levant les yeux au ciel, je me contentais de faire passer mon appareil en silencieux.
-Il ne nous dérangera plus, commentais-je alors, tandis que le visage de mon compagnon se fendait d'un sourire amusé.
En effet, le téléphone eut beau se manifester plusieurs fois que nous ne l'entendîmes pas, et continuâmes notre affaire sans prendre connaissances des nouvelles que l'on avait souhaité me faire parvenir. Tout du moins jusqu'à ce que, agacé par la lumière qui ne cessait de s'allumer et de s'éteindre sur l'écran de celui-ci, Nate contrôlé par sa jalousie maladive ne s'en saisisse afin de lire le nom du contact qui ne cessait de me harceler. Alors que je le pensais partir dans une de ces sempiternelles crises de nerfs, je le vis froncer les sourcils, pour finalement lâcher un soupir d'exaspération.
-Eh merde, souffla-t-il, avant de répondre à mon regard interrogatif.
-C'est ta pote, elle est sur la route.
Attrapant le portable qu'il me tendait, je consultais mes derniers messages reçus, avant de finalement lui hurler de se grouiller lorsque je remarquais l'heure à laquelle le dernier m'était parvenu.
-Etait. Elle devrait débarquer dans quelques minutes, l'informai-je en lui lançant ses affaires pour lui permettre de se rhabiller en vitesse. Ce qu'il fit, non sans exprimer à l'aide d'un langage très coloré son mécontentement quant à la tournure des événements.
-Je suis désolée bébé, m'excusai-je en l'embrassant une dernière fois en guise d'au-revoir.
-Je sais, fut sa seule réponse à mon égard avant que nous puissions entendre la poignée de la porte couiner, indiquant l'arrivée imminente de mon amie, qui, une fois entrée, lança un regard circonspect à la silhouette masculine à mes côtés.
Sans s'encombrer des formalités qui auraient été inutiles en ce genre de situation, Nate se contenta d'attraper son sac au vol, avant de lancer à ma colocataire un "c'est bon, j'me casse" en passant par la porte qu'elle venait d'ouvrir.